- Type : Tunnels / Tranchées couvertes
- Etat d’avancement : Finalisé
- Autorité compétente : Administration des ponts et chaussées
- Date de mise en service : 2012
- Commune(s) : Lorentzweiler
Le projet
Le 'Tunnel Grouft' est composé de deux tubes pratiquement parallèles, dont chacun a une longueur de 2.966 m en souterrain (PK 6300 au PK 9266). Il relie le 'Plateau Haeschtreferbierg' au sud à la 'Vallée de l'Alzette' au nord.
En élévation, le tunnel accuse une pente maximale de 4,63 % à partir du portail de la 'Vallée de l'Alzette' situé au PK 6300.
En plan, le tunnel décrit une double courbe de rayons principaux r = 2.000 m , resp. r =1.120 m, qui s'aligne au tracé à ciel ouvert vers Luxembourg au sud et vers Mersch au nord. Le dévers max. est de 3% dans les deux tubes.
A l'endroit des portails, l'entredistance axe-axe des deux tubes varie d'un minimum de 20,40 m pour atteindre un maximum de 41,55 m en section courante, l'écartement se faisant en éventail sur environ 700 m au sud et 800 m au nord.
La couverture en rocher sur le tunnel est variable entre un minimum de 3 à 4 m dans les zones des fronts d'attaque et un maximum de quelque 80 m.
Pratiquement sur toute sa longueur, le tunnel passe sous des forêts et des champs.
Dix galeries transversales relient les deux tubes, celles aux PK 6850, 7685, 7875 et 8700 permettent le passage aux véhicules de secours et abritent des installations électro-mécaniques. Comme la topographie du site est favorable, au PK 7875, donc en plein milieu du tunnel principal, est aménagé un tunnel secondaire donnant accés au CR 122. Ce tunnel favorise, en cas de sinistre, une intervention des plus rapides des services de secours, qui ont leur base nationale à Lintgen, donc à seulement 3 km de l'entrée de ce tunnel de secours.
Les profils-types du 'Tunnel Grouft' sont ceux d'un profil en fer à cheval, respectivement d'un profil en contrevoûte avec une surface nette de 58,50 m2 en section courante pour le tube à' 2 voies et de 87,40 m2 pour le tube à 3 voies. La section d'excavation théorique en section courante varie, selon les classes respectives, de 80,10 m2 à 118,00 m2 pour le profil en fer à cheval et de 102,20 m2 à 170,00 m2 pour le profil en contrevoûte.
Troisième voie, considérations de sécurité
Problème de la sécurité du trafic dans le cas d'un tube montant à 2 voies:
Le 'Tunnel Grouft' a une longueur de 2.966 m par tube et présente une pente moyenne de 4,5 % qui est adoucie par des rayons de raccordement verticaux à l'endroit des 2 portails. L' 'Echangeur de Lorentzweiler' se trouve à environ 400 m du portail nord dans la 'Vallée de l'Alzette'. Les bretelles d'entrée et de sortie de cet échangeur évoluent avec une pente d'environ 6 %. Le prorata des poids lourds peut raisonnablement être évalué à quelque 10 % à 15 % du trafic total.
Dans ces conditions, sans précautions particulières, la fluidité du trafic n'est plus garantie. Cela affecterait inévitablement la sécurité générale dans le tunnel dans beaucoup de configurations quasi quotidiennes (heures de pointe, ralentissements causés par le trafic lourd, etc...). Des situations particulièrement dangereuses pourraient se présenter au nord, lors de l'insertion d'un véhicule dans le tunnel (un poids lourd avancera forcément très lentement sur la rampe à 6 % et constituera par là un obstacle périlleux certain).
Selon les recommandations de la société VSS (Union des professionnels Suisses de la route) des manœuvres d'insertion à moins de 100 m du portail inférieur ne sont pas admissibles. (Il faut remarquer que la plupart des accidents en tunnel se passent effectivement à' la hauteur de leurs entrées et sorties).
Or, tout en optimisant le tracé de la bretelle d'insertion, son nez physique se trouverait à ca. 130 m et son nez géométrique (le point où le tracé de la bretelle serait parallèle à l'axe de l'autoroute) à seulement quelques mètres du portail même (de l'entrée en galerie souterraine proprement dite, les ouvrages d'entrée et de sortie étant de toute façon déjà' pleinement affectés par la déviation de l'axe de la bretelle). Par conséquent, le secteur d'insertion (composé par la zone d'accélération, la zone de manœuvre et la zone d'insertion proprement dite) se trouverait dans sa totalité en souterrain.
Une représentation planimétrique de la situation au droit de l'échangeur montre que la voie d'insertion complète se développerait sur une longueur de plus de 400 m en tunnel. Il faudrait donc de toute façon munir l'ouvrage d'une 3ème voie, dans le tube montant, sur cette distance au moins.
Cependant, en souterrain, des réductions de voies de roulement sont fortement déconseillées, en particulier dans le cas d'une forte pente longitudinale (cf. aussi la remarque faite plus haut sur la fréquence accrue des accidents en ces endroits). Cet état de fait a incité le Maître d'Œuvre à analyser la possibilité de la réalisation et les conséquences intrinsèques du prolongement de cette troisième voie en direction N-S sur toute la longueur du tunnel.
Tunnel de secours
Dans le cas d'un sinistre, la rapidité de l'intervention des services de secours est en général primordiale. Au 'Tunnel Grouft' en particulier, un concours de circonstances outre mesure favorables ont incité le Maître de l'Ouvrage - pour satisfaire cette exigence - à prévoir un ouvrage d'accès en plein milieu du tunnel principal. Ces circonstances favorables sont notamment la topographie du site permettant de réduire la longueur du conduit souterrain à quelque 100 mètres, le CR 122 longeant cet endroit précis et la proximité de la base nationale des services d'intervention à Lintgen. Grâce à ce tunnel de secours et à une galerie transversale carrossable dans son prolongement, les services d'urgence pourront accéder dans les plus brefs délais dans les deux tubes du 'Tunnel Grouft'. En plus, on a profité de cet ouvrage, pour aménager une centrale de ventilation permettant d'extraire des fumées sans devoir les cheminer jusqu'aux portails.
Le tunnel de secours, du point de vue de la sécurité, scinde donc le 'Tunnel Grouft' en deux de telle sorte qu'on aura affaire en réalité non à un ouvrage à risques accrus de 3000 m, mais à deux ouvrages à moindres risques de 1500 m.
Il y a cependant lieu de souligner que sa réalisation sera pour le moins délicate: Non seulement aura-t-on affaire de par sa géométrie tridimensionnelle complexe à des concentrations réduites d'efforts très importantes, la maîtrise desquelles imposera des excavations partielles et des confortements lourds, mais, de surcroît, faudra-t-il traverser une géologie peu saine, en l'occurrence la formation du Rhétien déjà difficilement maîtrisable en section courante.
Géologie
Le substratum traversé par le 'Tunnel Grouft' fait partie des âges jurassique (étages du Lias Inférieur et en particulier de l'Hettangien) et triasique (étages du Rhétien et du Keuper moyen):
- li2 Grés de Luxembourg
- li1 Couches à Psiloceras Planorbis
- ko1,2 Rhétien
- km3 Keuper à Marnolites Compactes
Pour une attaque descendante, ces formations seront traversées en série, du haut vers le bas, en commençant par le massif gréseux, moyennement dur, au droit du 'Plateau Haeschtreferbierg' pour finir dans les marnes dolomitiques, plutôt tendres, dans la vallée de l'Alzette, respectivement vice-versa dans le cas d'une attaque montante. En réalité, et pour garantir des délais d'exécution raisonnables, le 'Tunnel Grouft' sera attaqué par les 2 côtés, sur 4 fronts, avec des avancements combinés descendant et montant.
Les reconnaissances géologiques préalables ont fait apparaître une nappe phréatique importante, exploitée, contenue dans les niveaux inférieurs de la formation du Grés de Luxembourg (li2). De nombreuses sources émergent à sa base peu perméable. La circulation hydraulique dans le sous-sol est assurée par un degré de fissuration élevé et des phénomènes karstiques le long de ces fissures.
Pendant la construction du 'Tunnel Grouft', il faudra s'assurer d'une évacuation diligente de ces eaux, au vu notamment de l'altérabilité élevée des étages triasiques sous-jacents traversés dans un milieu aqueux, soit par drainage forcé, soit par un rideau d'injections, formant une cuve étanche autour des cavités.
En situation définitive, au droit de la traversée de la nappe, il faudra rendre le tunnel entièrement étanche par un profil en contrevoûte sur une longueur de ca. 700 m pour pallier tout effet réciproque entre l'aquifère et l'ouvrage. Il faudra notamment éviter de drainer d'une façon permanente la nappe le long du tunnel, afin de pouvoir restituer l'eau potable aux exploitants actuels. De même, toute pollution de l'aquifère en provenance du tunnel devra être évitée.
Même si la majorité du tunnel est creusé dans les marnes du Keuper moyen, comme au tunnel Gousseler, en l'occurrence les marnes dolomitiques, trois autres lithotypes apparaissent ici:
Le Rhétien (ko1,2) est connu avant tout par ses effets spectaculaires : La plupart des glissements de terrain au Grand-Duché prennent effectivement naissance dans cette formation et ce avec des pentes souvent peu raides, voire douces de 10° à 20° seulement. A quoi est-ce dû ? Les argilites ont des valeurs intrinséques de résistances géomécaniques de pic très satisfaisantes, voire bonnes, notamment en ce qui concerne leur cohésion.
Hélas, soumises à' la moindre déformation induite, ces résistances chutent brutalement pour se stabiliser à des valeurs résiduelles de moins de 10 % des résistances initiales. De surcroît, le potentiel de travail initial n'est, dans un tel cas, plus jamais rétabli. Lors de la traversée de cette formation, il faut donc agir avec diligence afin d'éviter des déformations intempestives pouvant déclencher une espèce de perpetuum mobile géomécanique plus guère contrôlable.
Une deuxième raison interdit toute déformation d'ampleur, et, partant, toute création de fissures et de vides dans ce faciès : Le Rhétien contient de la montmorillonite, argile élémentaire trés sensible à l'eau dont la présence peut déclencher et entretenir un gonflement (Tonquellen) outre mesure important.
Enfin, le Rhétien a quand même une propriété très positive : Sa compacité, en faisant barrière, interdit toute percolation des eaux souterraines contenues dans le grès vers les niveaux marneux sous-jacents.
La formation du Lias Inférieur (li1) est moins spectaculaire. Elle est formée d'une alternance de bancs de marnes tendres et de bancs de calcaire dur à trés dur, ce qui lui confère un comportement géomécanique satisfaisant mais, en revanche, peut poser certains problèmes lors de l'exécution, notamment concernant la technique de forage.
La formation du Grés de Luxembourg (li2) contient à sa base une nappe phréatique importante d'une dizaine de mètres de colonne d'eau qu'il faut maîtriser par la mise en oeuvre d'une contrevoute étanche, déjà lors de l'excavation, au plus tard 30 m après le passage du front. La nappe est définitivement mise en sécurité par des rideaux d'injections sur tout le pourtour de l'ouvrage aux extrémités du secteur concerné.
Exécution
L'exécution décrite pour le 'Tunnel Gousselerbierg' est tout aussi valable pour le 'Tunnel Grouft'.
Il y a cependant lieu de soulever quelques particularités. Le tube à 3 voies avec sa section, pouvant atteindre les 170 m en section courante avec le profil en contrevoûte, sera parmi les profils les plus importants jamais réalisés sans tunnelier dans des roches tendres.
Les difficultés à maîtriser n'augmentent pas seulement linéairement avec le volume excavé, mais aussi exponentiellement. Un des plus grands problèmes à résoudre sera la tenue de front - problème de stabilité du 4ième degré - qui dépassera localement les 10 m de haut, ce qui correspond à un immeuble à 3 étages. Il faudra par endroits le conforter en amont de l'excavation par la mise en place de boulons synthétiques en fibres de verre jusqu'à 15 m de long - boulons qui se cassent aisément lors de l'avancement sans qu'ils ne se dégradent pour ce qui est de leur longueur encore scellée dans le massif - afin d'éviter des accidents (chute libre de pierres disloquées), voire la création de fontis importants pouvant atteindre la surface.
De surcroît, l'eau, d'une part parce qu'elle altère les propriétés géomécaniques, et notamment la cohésion des marnes, d'autre part on sera localement confronté à des pressions hydrostatiques importantes - un tonneau contenant 1.000 litres de vin peut 'exploser' avec 1 litre d'eau seulement s'il est pourvu d'une chantepleure suffisamment élancée ne facilitera pas la tâche.
Dans certaines zones, et en particulier lors de la traversée de la nappe phréatique, il faudra de suite, soit vers les 30 m en arrière du front, 'fermer' le profil par une contre-voûte, qui jouera un double rôle : elle interdira toute infiltration dans le profil, et, elle répartira les efforts existants dans le soutènement - qu'il faudra préalablement reprendre en sous-oeuvre - sur toute la surface de l'excavation, palliant ainsi d'office tout phénomène de gonflement inévitable, au vu de la minéralogie du massif et du milieu acqueux traversé.
Percement du tunnel
Le lundi 4 décembre 2006 a eu lieu le percement du tunnel en présence de S.A.R. le Grand-Duc Henri.
Le tunnel routier du Grouft constitue la pièce maîtresse de la Route du Nord – la future autoroute reliant le nord du Luxembourg à la capitale.
Les deux tubes – d’une longueur respective d’environ 3.000 m – représentent, avec un volume d’excavation de 650.000 m³ et une section de creusement maximale de plus de 170 m², un défi technique et logistique pour tous les participants. L’installation du chantier a débuté le 14 février 2005. Le 24 août 2005, les travaux de creusement de la calotte du Tunnel Grouft commençaient. Dans un même temps, le creusement du tube à 2 voies a été entamé au Nord et au Sud. Quelques semaines plus tard, les travaux du tube à 3 voies suivaient.
Grâce au travail qu’ils ont accompli au moyen d’engins spéciaux puissants (principalement 5 jumbos de forage, 4 pelleteuses, 15 dumpers et 4 grandes chargeuses sur roues), les 250 acteurs de cette aventure peuvent être fiers - après 15 mois de travail - de pouvoir procéder le 4 décembre 2006 au percement du tube à 2 voies
Fiche technique
Caractéristiques et volumes principaux du tunnel
Le tunnel est constitué de 2 tubes, dont un tube à 2 voies de circulation (trafic descendant) et un tube à 3 voies de circulation (une voie lente a été ajoutée pour le trafic montant)
Caractéristiques | Volumes | Options |
---|---|---|
Longueur d'excavation | 2 x 2966 m | |
Largeur nette de la chaussée | 7 m | (tube 2 voies) |
10,50 m | ||
Largeur brute utile des tunnels | 10 à 13,50 m | |
Pente longitudinale | 4,50 % | |
Profils-types d'excavation | 69,50 à 111,70 m2 | pour les profils en fer à cheval |
99,00 à 164,10 m2 | pour les profils en contrevoûte | |
Volume total de l'excavation | 680 000 m3 | (non foisonné et sans hors-profils) |
Volume du béton de revêtement | 85 000 m3 | (avec béton des hors-profils estimés) |
Volume du béton projeté anneau extérieur | 75 000 m3 | |
Etanchéité des tunnels | 190 000 m2 |
Pour délester les routes de la vallée de l’Alzette, il a été décidé d’apporter 280'000 tonnes de matériaux de construction par train dans le cadre du chantier Grouft.
Planning des travaux
Types | Date d'intervention |
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Génie civil |
|
Début des travaux | 14 février 2005 |
Délais contractuel | 54 mois |
Fin des travaux de génie civil | mi 2009 |
Installations électromécanique | |
Début des travaux | 2009 |
Délais contractuel | 22 mois |
fin des travaux de génie civil | 2011 |
Mise en service du tunnel | 2011 |
Montant de l’adjudication genie civil | 171'226'416.4 EUR TTC |
Adjudicataire génie civil | Association momentanée |
Wayss & Freytag / Max Bögl / Galère / TRALUX / Félix Giorgetti | |
Projet : Association des bureaux d’études | LUXCONSULT – LOMBARDI |
Direction locale des travaux | Association des bureaux d’études TR-Engineering – GEOS |
Coordination de sécurité et de santé | Association des bureaux d’études SCHROEDER – SECOLUX |
Maître d’œuvre – maître d’ouvrage délégué | Administration des Ponts et Chaussées |
Maître d’ouvrage | Ministère des Travaux Publics |